Pourquoi la compassion ? Comprendre une de nos valeurs fondamentales

31 mars, 2025 | Initiatives et projets

Lorsque la Corporation catholique de la santé du Manitoba a été rebaptisée Réseau Compassion Network (RCN) en 2020, l’essence du travail effectué au sein de nos organisations a fait l’objet de nombreuses réflexions et discussions. Comment représenter au mieux l’esprit, les valeurs et la foi qui guident notre travail dans un contexte contemporain ?

La compassion. Ce mot figure dans notre titre et est présent dans tout ce que nous faisons. Plus qu’un vocabulaire, c’est une façon d’être. C’est aussi un moyen éprouvé d’améliorer les soins et les résultats dans nos communautés.

Dr Shane Sinclair

Le Dr Shane Sinclair est le fondateur et le directeur du Compassion Research Lab, basé à Calgary. L’organisation est spécialisée dans la compréhension, la recherche et la promotion de la compassion dans les soins de santé. « La compassion est importante dans ces environnements, surtout parce qu’elle est très importante pour les patient.e.s et les familles », explique-t-il. « Grâce à notre travail, nous savons qu’elle est présente dans chaque expérience et qu’elle est importante dans chaque interaction. Elle a un impact sur les résultats, la satisfaction et l’expérience des patients. La compassion est l’adhésif des soins de santé.

Au Réseau Compassion Network, où l’un de nos principaux objectifs est de veiller à ce que l’esprit d’attention, d’amour et de communauté insufflé aux organisations par les femmes religieuses continue de vivre, nous nous attachons à créer les conditions propices à l’épanouissement de la compassion. Andrew Terhoch, praticien en santé spirituelle à St.Amant et pour RCN, est en partie responsable de l’aide apportée aux leaders et au personnel pour qu’ils fassent de la compassion une façon d’être au travail.

« La compassion est un terme médical qui désigne en fait l’amour », explique-t-il. « Il signifie que je vous vois, que je me sens proche de vous. Elle crée les conditions nécessaires à l’émergence de l’amour et nous permet de trouver le moyen d’être avec la souffrance. Nous n’essayons pas de la réparer ou de la faire disparaître, parce que la souffrance fait partie de l’être humain, et parfois de la maladie, mais c’est ainsi que le Réseau Compassion Network réagit : avec compassion. »

Terhoch propose des pratiques contemplatives au personnel et aux bénévoles de l’ensemble du réseau. Actuellement, deux retraites de cinq jours sont proposées chaque année aux dirigeant.e.s, des mini-retraites sont proposées chaque mois, ainsi qu’un cercle de méditation hebdomadaire de courte durée sur Zoom.

Andrew Terhoch mène une pratique contemplative.

« Nous pensons que ceux et celles qui dirigent doivent disposer de l’espace et du soutien nécessaires pour pouvoir cultiver la présence en eux-mêmes », poursuit M. Terhoch. « Avec les retraites, nous n’enseignons rien. Nous créons l’espace nécessaire pour que les gens prennent soin de chaque partie d’eux-mêmes, de manière inconditionnelle. Nous leur donnons du temps et de l’espace pour s’aimer eux-mêmes. C’est magnifique de voir cela se produire, de voir ces personnes très occupées ralentir et se reconnecter à leur vocation. »

Le Dr Sinclair reconnaît que si la raison principale de la compassion est de créer des espaces de sécurité et de guérison pour les patient.e.s et leurs familles, il existe un effet secondaire important : elle a également un impact positif sur les prestataires de soins de santé. À une époque où les systèmes de santé et de services sociaux sont surchargés et où les organisations sont de plus en plus sollicitées, la compassion a un effet protecteur. « Les données sont claires », poursuit le Dr Sinclair. « L’impact de la compassion sur le personnel est multiple : bien-être au travail, satisfaction accrue, lutte contre l’épuisement professionnel, fidélisation des employé.e.s… la compassion est un ingrédient très important de tous ces facteurs mesurables. »

Le Réseau Compassion Network s’emploie activement à trouver des moyens d’aider les leaders à cultiver la compassion. La prochaine étape consiste à diffuser la valeur et les pratiques de la compassion dans l’ensemble du réseau. « Comment rendre la compassion opérationnelle ? s’interroge M. Terhoch. « Je sais que cela peut sembler dénué de tout lien spirituel, mais je sais aussi que les gens viennent dans les organisations de notre réseau et nous disent qu’ils ressentent quelque chose de différent. Nous devons protéger cela. Nous devons connaître la source de ce qui rend nos organisations spéciales : ce sont nos gens qui y sont dévoués et la manière dont ils se présentent. »

L’opérationnalisation de la compassion pourrait-elle simplement consister à donner l’exemple ? « Je pense aux environnements médicaux où la violence est de plus en plus fréquente », explique M. Terhoch. « Oui, les dirigeant.e.s peuvent expliquer quelles sont les mesures de sécurité en place et ce que le personnel peut faire pour rester en sécurité. Mais ils peuvent aussi dire : « Nous sommes vraiment désolés. Nous sommes désolés que l’endroit où vous travaillez et où vous vous occupez des gens soit devenu effrayant. Nous sommes désolés. Nous savons que le monde est difficile en ce moment et que les gens essaient d’apporter des changements, mais nous pouvons aussi reconnaître la tristesse de ce qui se passe. »

Des facteurs externes comme la sécurité, et même des facteurs administratifs comme le financement, peuvent rendre la compassion plus difficile à cultiver. « Dans l’ensemble, la plupart des membres du personnel d’un établissement de santé seraient d’accord pour disposer de plus de temps et d’espace pour offrir de la compassion », explique le Dr Sinclair. « Nous devons donc nous attacher à doter les individus d’outils fondés sur des données probantes pour les aider à cultiver la compassion. Mais cette démarche doit également s’accompagner d’un changement de culture organisationnelle. Il faut les deux. »

Pour le Dr Sinclair, la compassion est souvent une simple reconnaissance de notre humanité commune. « Qu’est-ce que cela signifie d’être traité avec compassion ? Cela signifie que vous êtes compris en tant que personne et pas seulement en tant que patient.e. Il y a un sentiment de chaleur, de bonté aimante, de présence que les prestataires de soins apportent avec eux, et cela apporte la plénitude au patient. Le fait de savoir que quelqu’un se soucie de lui ou d’elle apporte un sentiment d’espoir. »

M. Terhoch est en mesure de relier ce sentiment d’espoir et d’attention à l’histoire du Réseau Compassion Network. « Nous sommes appelés à faire ce que les sœurs faisaient, c’est-à-dire aimer les gens », explique-t-il. « Il y a cent ans, lorsque les sœurs marchaient dans les couloirs de ces organisations, elles étaient toutes des personnages différents qui servaient de différentes manières. Il est certain qu’en tant que leaders, nous devons veiller à voir chacun pour ce qu’il est et à reconnaître ses dons. Chacun d’entre nous est appelé à se présenter comme une personne entière et aimante. C’est ce que nous essayons de cultiver avec les pratiques contemplatives : être capable de se montrer tel que nous sommes et d’être vraiment avec les autres. »

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