Le mot du cœur se veut un lieu pour exposer les réflexions des membres du personnel sur des questions qui comptent pour eux, pour notre réseau et, plus important encore, pour les personnes que nous accompagnons.
Ce mois-ci, Jocelyne Nicolas, membre de notre équipe de communication, nous fait part de ses réflexions sur l’espoir, la compassion et les femmes qu’elle a rencontrées dans le cadre de son travail avec nous et qui lui rappellent ce qui compte.
J’ai rencontré l’aînée Mae Louise Campbell par un froid lundi de décembre et nous avons passé une heure à parler du Clan Mothers Healing Village. Elle m’a décrit sa vision pour cet espace de guérison pour femmes autochtones, puis notre conversation a bifurqué sur les défis que notre pays devait relever pour rester uni : division, perte de confiance, peur. À un moment donné, nous parlions du rôle que tous les Canadiens doivent jouer dans le processus de réconciliation, et elle m’a dit ceci : « Nous devons commencer par dire la vérité. Il ne peut y avoir d’amour sans vérité. Il ne peut y avoir de respect sans vérité. »
Quelques mois plus tard, je me suis retrouvée dans le salon de la House of Peace, au centre‑ville de Winnipeg, qui fait l’objet d’un article dans le bulletin électronique de ce mois‑ci. Soeur Lesley Sacouman m’a fait visiter la chapelle, les espaces communautaires et la partie réservée aux chambres, où elle et 20 autres femmes, toutes réfugiées ou immigrantes, se construisent une nouvelle vie pour elles‑même et pour leurs familles. Tout le mobilier de l’immeuble a été donné, la plupart du temps par de généreux et fortunés donateurs. En visitant la salle à manger rénovée, l’une des donateurs s’est exclamée : « C’est plus beau que chez‑moi ! » Sœur Sacouman lui a répondu : « Et pourquoi ce ne devrait pas l’être? »
Il y avait une pointe d’insolence voulue dans sa réponse, mais sœur Sacouman voulait envoyer un message : les immigrantes et les réfugiées méritent, elles aussi, d’avoir un foyer magnifique et rempli d’amour. « Je sais que j’ai été un peu effrontée, mais si je ne peux pas dire la vérité à une amie, qui pourra le faire? » Son audace m’a fait sourire et m’a rappelé l’aînée Campbell.
Récemment, j’ai rencontré les religieuses Mary Coswin et Dorothy Levandosky, deux bénédictines. Elles se préparaient à déménager à leur nouvelle résidence après avoir vendu leur monastère de West St. Paul à la Southeast Resource Development Corporation, un groupe autochtone qui a l’intention d’y loger des membres de la communauté et d’y offrir des services de soutien. Pour les sœurs, la boucle est bouclée. « Nous avons compris que le travail que les nouveaux propriétaires souhaitent faire correspond tout à fait à celui que nous avons accompli au fil des ans, explique sœur Coswin. Au fond de mon cœur, j’avais l’intuition que cette vente n’allait pas marquer la fin du centre. Aujourd’hui, nous en avons la confirmation. »
« Vous savez, nous avons trouvé des flèches au bord de la rivière, tout près d’ici, poursuit sœur Levandosky. Les Autochtones occupaient ce terrain bien avant nous. Il nous semblait donc juste qu’il leur soit rendu. »
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J’ai trouvé un grand réconfort auprès de ces femmes et dans leurs histoires. Je suis aussi frappée par tous les points qu’elles ont en commun. Elles mettent l’accent sur la vérité, la création de liens entre les gens, la providence et l’espoir. Quelle que soit leur origine, ces femmes ont décidé d’être un catalyseur de changement au sein de leur communauté, avec souvent rien d’autre que leur certitude que tout ira bien.
Lorsque j’ai échangé quelques réflexions sur le colonialisme avec l’aînée Campbell, un peu inquiète de m’avancer un peu trop en tant que non Autochtone, elle m’a répondu : « Ma fille, tu as tout compris », j’ai ressenti de l’acceptation.
Quand sœur Levandosky et moi parlions de nos espoirs et de nos rêves pour l’avenir, soeur Coswin nous écoutait en silence, puis elle m’a prédit que j’allais obtenir tout ce que je souhaitais, j’ai ressenti de l’espoir.
Quand j’ai avoué à soeur Sacouman que, même si je ne suis pas une catholique pratiquante, j’ai souvent l’impression que j’aurais pu être une bonne religieuse, elle m’a souri en disant : « Tu es une femme de foi, tu sais. Tu es des nôtres », j’ai ressenti une appartenance.
Ces femmes ont été un cadeau pour moi en cette période difficile. Elles sont un rappel des liens qui unissent et possèdent cette faculté de voir la véritable nature des personnes qu’elles rencontrent. Il est facile d’oublier, en regardant les nouvelles, que le monde est rempli de personnes qui se soucient des autres et qui nous guident avec espoir et compassion. Ces personnes sont encore parmi nous et elles le seront toujours.