Paul Vermette, notre directeur des initiatives stratégiques, a récemment participé à la conférence Putting Care at the Centre à Pittsburgh, en Pennsylvanie. Lui-même, ainsi que des dirigeant.e.s de Sara Riel et du Centre santé communautaire Youville, étaient présents pour découvrir comment d’autres prestataires de soins de santé en Amérique du Nord s’occupent de la personne dans sa globalité. Il s’est entretenu avec nous de son expérience.
Pourquoi était-il important pour le Réseau Compassion Network et certains de ses membres de participer à cette conférence ?
Paul Vermette (PV) : La conférence était axée sur l’idée que de nombreuses causes d’une mauvaise santé sont mieux traitées par des interventions non médicales, parfois aussi simples qu’une alimentation plus nutritive. Elle était organisée par la Coalition Camden, une organisation à but non lucratif basée dans le New Jersey qui montre comment les services sociaux et les services médicaux peuvent s’unir pour soutenir des personnes dans leur entièreté et obtenir de meilleurs résultats en matière de santé pour tout le monde, et souvent, à moindre coût également. Les membres du groupe de travail de notre réseau ont discuté de la manière dont nous pourrions mieux soigner et soutenir les personnes confrontées à des facteurs sociaux complexes de la santé, et nous sommes allés à la conférence pour apprendre et être inspirés.
À quoi ressemblerait l’utilisation d’interventions sociales au lieu d’interventions médicales?
PV : Une histoire très marquante a été diffusée par le Boston Medical Center. Il s’agit d’une organisation de soins responsable, ce qui signifie qu’elle doit s’occuper de l’ensemble de sa communauté, quelle que soit la capacité de paiement de chacun.
Ils sont situés à proximité de plusieurs grands campements, où les gens vivent en quelque sorte sans abri et sont confrontés à de nombreux défis. Les médecins de leur service d’urgence ont remarqué qu’ils voyaient souvent les mêmes personnes en crise, parfois plus de 15 fois par mois, et qu’elles quittaient régulièrement le service d’urgence sans avoir été examinées. Ils se sont demandé s’il n’y avait pas un meilleur moyen de soutenir ces personnes, afin qu’elles n’atteignent plus le stade de crise nécessitant des soins d’urgence.
Comme le Réseau Compassion Networtk, le Boston Medical Center fait partie d’un réseau d’organisations de santé et de services sociaux, ce qui lui permet de s’appuyer sur une communauté diversifiée pouvant fournir divers types de soutien autour d’elle.
Après avoir pris le temps de discuter et de comprendre les besoins des personnes qu’ils soutenaient, la décision a été prise de lancer un nouveau programme avec un ensemble de services prêts à être offerts par les équipes existantes et, plus important encore, par des pairs ayant de l’expérience de vécu, agissant à titre de travailleurs de soutien au service des urgences. Ces personnes ont littéralement habité dans les campements jusqu’à une date récente. Ces travailleurs sont les personnes les plus importantes de ce nouveau programme. Grâce à leur expérience vécue, ils étaient beaucoup plus à même d’établir des relations de confiance avec les patients. Il fallait parfois de nombreuses visites, mais les patients sentaient que cette personne était « l’une des leurs » et ils étaient plus disposés à recevoir de l’aide; comme un soutien pour obtenir de l’accès à un logement, de l’aide pour combattre la toxicomanie, ou d’autres programmes thérapeutiques appropriés à leur situation.
Résultat : les visites aux urgences ont chuté de plus de 20 % et le nombre de personnes quittant les urgences sans avoir été vues a été réduit de près de moitié. Ces données sont impressionnantes, voire choquantes, mais ce qu’elles représentent est également très intéressant.
Qu’est-ce que ces données nous apprennent?
PV : Elles mettent en évidence ce que beaucoup de nos prestataires de première ligne ont toujours su : lorsque nous écoutons les voix et les expériences de ceux et celles qui ont vécu une situation particulière, comme se retrouver sans abri, les résultats pour ces personnes s’améliorent. Ces gens vivent ce que la plupart d’entre nous considéreraient comme les jours les plus difficiles de notre vie, et ce, jour après jour. Il s’agit d’adapter nos soins et nos systèmes à ces personnes, et non de leur demander de s’adapter à nous et au système.
Nous savons que nos réseaux de santé et de services sociaux sont cloisonnés ; nous savons que de nombreux individus passent à travers les mailles du filet. Cette conférence nous a permis d’être inspirés. Elle nous a également aidés à comprendre la richesse des expériences et des modèles d’autres personnes qui soutiennent les gens de manière nouvelle et plus efficace. Les agences de notre réseau veulent obtenir de meilleurs résultats pour les individus qu’elles soutiennent, et nous avons de nouvelles idées intéressantes pour y parvenir.