Des chercheurs de l’Université de Saint-Boniface (USB) soutiennent que les aînés francophones souffrent davantage de la solitude que leurs homologues anglophones à cause de la barrière de la langue. Les chercheurs ont soulevé cette question en 2019. Ils ont créé un partenariat avec Actionmarguerite afin d’étudier les impacts sur la solitude des aînés et la perception des jeunes envers cette population dans le cadre d’un programme intergénérationnel.
Durant huit semaines, des enfants francophones de trois et quatre ans de la Garderie des Bambins Inc. à Saint-Boniface se sont rendus à Actionmarguerite. À chaque aîné s’est fait assigner un enfant et ensemble, les pairs participaient à des activités tels que le yoga, les arts et le bricolage. « Les activités servaient à créer des liens entre les enfants et les résidents », explique Daniel St-Vincent, gestionnaire de l’expérience des résidents à Actionmarguerite.
Le personnel d’Actionmarguerite n’a pas été surpris par les conclusions de la recherche qui démontraient que les programmes intergénérationnels aident à la réduction de la solitude. « Les résidents ont créé des liens étroits avec les gamins », affirme Daniel. « L’un des résidents arrivaient dans la salle en chantant les jours où les jeunes étaient attendus. Une autre résidente avait revu son horaire afin de ne manquer aucune visite des enfants ».
Le programme a été bénéfique tant pour les résidents que les enfants. Avant de participer au programme, Maria Mbaye, la fille d’Andy Dusabe Mbaye, n’avait que très peu de contact avec les aînés. « Je travaillais à Actionmarguerite à l’époque et un jour, j’ai emmené Maria au travail avec moi. Elle avait été surprise de voir un aîné en fauteuil roulant », raconte Andy. Pour Andy, le programme était l’occasion pour sa fille de mieux comprendre et d’apprécier les aînés. « Au début, Maria était très timide, mais vers la fin, elle avait complètement oublié les fauteuils roulants, les marchettes, et même les différences d’âge », raconte Andy. « La seule chose qui lui importait c’était de s’amuser ensemble ».
Quand le projet de recherche s’est conclu, ce n’est pas un chapitre qui s’est terminé, mais une nouvelle opportunité qui s’est créée. En janvier 2020, la directrice de la Garderie des Bambins de Saint-Boniface a appelé Daniel pour savoir s’il était possible de mettre sur pied un programme intergénérationnel, en dehors du cadre de recherche. « Elle a dit que les petits amis voulaient revoir leurs grands amis », se souvient Daniel. « J’en ai eu des larmes aux yeux car c’est ce que nous souhaitions créer, à Actionmarguerite : un lien intergénérationnel durable et une communauté ».
Actionmarguerite connaissait déjà la valeur des programmes intergénérationnels, bien avant la recherche de l’USB. Au cours des années, Daniel avait entamé des démarches auprès de garderies et de la Fédération des parents de la francophonie manitobaine pour mettre sur pied des programmes du genre. Plusieurs embûches les ont empêchés de porter fruit. Mais Daniel s’est réjoui du projet de recherche de l’USB qu’il considère comme un franc succès.
« C’était génial qu’un projet puisse voir le jour alors qu’on en avait parlé durant plusieurs années », soutient Stéphanie Rouet, travailleuse sociale à Actionmarguerite. « Les programmes intergénérationnels ont un rôle important à jouer dans la vie des résidents. Tous les centres de soins devraient en avoir un ».
Durant la pandémie, Actionmarguerite n’a pas pu avoir de programme intergénérationnel, mais l’organisme entend bien reprendre le projet quand il sera sécuritaire de le faire.
Pour lire le projet de recherche, « Les Petits et les Grands amis : Favoriser des échanges et développer des attitudes favorables entre les générations en milieu minoritaire », appuyez ici.