Lorsqu’un rapport national a été publié portant sur l’augmentation importante des amputations des membres inférieurs dues au diabète, Toni Tilston-Jones, directrice générale du Centre Youville, a commencé à recevoir des questions de la part des médias. Elle avait beaucoup à partager avec les journalistes, notamment sur le fait qu’une solution simple et abordable pourrait réduire considérablement les amputations et autres complications dues au diabète : un dépistage systématique.
« À l’heure actuelle, de très nombreuses personnes atteintes du diabète ne bénéficient pas d’un dépistage pour des complications oculaires, podologiques et rénales », explique Mme Tilston-Jones. « Sans soins préventifs, les conséquences du diabète sur ces organes peuvent changer la vie. Nous parlons du risque de perdre la vue, de subir une amputation ou d’être sous dialyse. »

Si le désir de dépistage est motivé par l’amélioration des résultats pour les patient.e.s, le Centre Youville a également estimé l’impact financier qu’un simple dépistage pourrait avoir sur les soins du diabète au Manitoba. « Avec l’aide d’une subvention Inspiration du Réseau Compassion Network, nous avons pu déterminer que si nous pouvions effectuer un dépistage et prévenir une amputation dix fois par an, la clinique se paierait d’elle-même. Si nous parvenons à effectuer un dépistage correct, nous pourrons envoyer les patients au bon endroit pour qu’ils reçoivent un traitement qui améliorera considérablement leur qualité de vie au fil du temps.
L’équipement nécessaire pour effectuer le dépistage représenterait un coût unique de 155 000 dollars, et Mme Tilston-Jones estime que la clinique aurait besoin d’environ 390 000 dollars de frais de fonctionnement par an. Au Manitoba, l’amputation d’un membre inférieur coûte en moyenne 47 000 dollars.
Cela dit, Mme Tilston-Jones insiste sur le fait que si elle peut justifier le dépistage d’un point de vue financier, l’impact d’une amputation sur les patients et les familles ne peut vraiment pas être estimé. « Disons que vous perdez une jambe à cause de complications », dit-elle. « Qui peut calculer ce que cela coûte réellement ? Vous devez réaménager votre maison, vous ne pouvez pas travailler pendant une longue période, tout change pour vous… Ce sont littéralement de grands bouleversements dans votre vie. Quel est le coût pour votre santé mentale ? Les effets du dépistage seront si importants que mettre ce système en place s’agit pour moi d’une évidence. »
Comme Youville gère déjà le Centre pour le diabète, l’ajout d’un équipement de dépistage dans ses locaux est tout à fait logique. « Nous créons un écosystème de soins », poursuit Mme Tilston-Jones. « Nous avons déjà 5 000 à 6 000 patients qui franchissent nos portes pour traiter leur diabète. Maintenant, nous pourrions aussi aider à prévenir ou à retarder un grand nombre de ces complications secondaires. »
Les complications et la pression exercée sur le système de santé sont également un facteur qui explique l’absence de dépistage approprié, explique Tilston-Jones. « La médecine est pratiquée par spécialités. Lorsque nous nous intéressons aux yeux, aux pieds et aux reins, il s’agit de spécialités différentes, et il est donc difficile de coordonner le dépistage dans ces domaines. Si l’on ajoute à cela le fait que le système de santé est en crise depuis COVID, nous comprenons que tout le monde fait de son mieux et que les médecins de famille ont également beaucoup de choses à gérer. Notre approche communautaire nous permet de trouver différentes façons de servir et de soigner les gens de façon plus efficace. »
Le Centre Youville espère vivre ses valeurs communautaires à travers la mise en œuvre d’un programme de dépistage. « Nous avons tant de merveilleux partenaires dans le secteur qui nous ont déjà contactés pour voir comment nous pouvons mieux travailler ensemble et créer de meilleurs résultats pour tous et toutes », conclut-elle. « Nous savons que nous pouvons assurer une formation polyvalente de notre personnel, travailler avec des podologues et d’autres spécialistes et faire une réelle différence dans la vie des personnes atteintes de diabètes ».