Le Principe de Jordan : un pas de plus vers la réconciliation

8 mai, 2019 | St.Amant

Mettre fin aux inégalités auxquelles sont confrontées les Premières Nations fait partie du processus de réconciliation. Un organisme manitobain membre de la communauté catholique de santé du Canada parvient avec succès à assembler différents morceaux du casse-tête.
Depuis l’automne 2017, les cliniciens de St.Amant se rendent dans des communautés des Premières Nations pour servir les besoins complexes des enfants handicapés et de leurs familles.

À ce jour, St.Amant a offert un appui à plus de 40 des 63 communautés du Manitoba. L’organisme a employé près de 30 travailleurs dévoués avec les financements du programme fédéral. St.Amant est l’un des nombreux organismes qui agissent à travers le Principe de Jordan au Manitoba.
Le mois dernier, Norm Martin, éducateur clinique à St.Amant, et Ben Adaman, responsable des services cliniques, ont partagé les progrès de l’organisme dans l’application du Principe de Jordan : initiative des enfants d’abord à l’occasion d’une présentation au comité permanent des Affaires autochtones et du Nord du Gouvernement fédéral à Ottawa.

« Nous avons été impliqué dans les cas de nombreux enfants qui ont été en mesure de rentrer chez eux après avoir été pris en charge par les Services à l’enfant et à la famille, ou qui, avec l’aide de nos cliniciens, ont pu rester chez eux entourés de leurs familles au lieu d’être placés », dit Ben Adaman.

Le programme tient son nom de Jordan Anderson, un enfant de cinq ans originaire de la Nation crie Norway House. Né avec un trouble de développement complexe, il nécessitait des soins médicaux spécialisés.
Hospitalisé à Winnipeg pour recevoir le traitement dont il avait besoin, il n’a malheureusement jamais pu rentrer chez lui à Norway House, car les services nécessaires n’y étaient pas disponibles. Il est mort à l’hôpital en 2005, alors que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial se renvoyaient la responsabilité du financement de ses soins à domicile.

Dix ans plus tard, le Tribunal canadien des Droits de la personne a ordonné la création du programme pour lequel certains se battaient depuis des années. Le tribunal a imposé au Gouvernement du Canada de mettre fin aux inégalités de santé auxquelles les enfants des Premières Nations étaient confrontés, une fois pour toutes.

Un récent sondage mené auprès des familles et des communautés impliquées dans le programme a indiqué que les services fournis par le Principe de Jordan étaient appropriés culturellement et répondaient à leurs besoins.
« Avant, il y avait très peu de ressources pour les enfants autochtones handicapés, remarque Norm Martin. De nombreuses familles recevaient le conseil de laisser leurs enfants aux Services à l’enfant et à la famille. Grâce au Principe de Jordan, les familles ont accès à toutes les ressources. »

À Ottawa, Ben Adaman et Norm Martin ont eu l’occasion d’échanger avec d’autres organismes de ce domaine, comme le First Nation Health and Social Secretariat of Manitoba. « Ils ont parlé de l’augmentation du nombre de médecins, d’étudiants en médecine et de professionnels de la santé chez les Premières Nations, dit Ben Adamant. J’ai vu une belle complémentarité avec ce que nous faisons en matière de perfectionnement professionnel des travailleurs de première ligne des communautés. St.Amant a offert 120 ateliers auxquels ont participé plus de 1 500 personnes au cours des 12 derniers mois. »

Pour fournir les services du programme, St.Amant utilise une approche centrée autour de l’enfant et de la personne, afin de répondre aux besoins de chacun. L’approche universelle n’existe pas, et St.Amant répond à de nombreux besoins de santé, besoins sociaux et besoins éducatifs à travers des ateliers qui traitent de divers sujets tels que la confidentialité, l’approche de soins centrée sur la famille, la gestion des comportements difficiles et la diminution du stress. »

John Leggat, le président-directeur général de St.Amant, estime qu’un accès égal aux soins de santé pour les Premières Nations est un droit humain fondamental. « La priorisation systémique de la vie en communauté plutôt qu’en institution doit continuer à être la direction à prendre quand nous fournissons des soins à des enfants handicapés qui auront besoin de services toute leur vie », dit-il.

Il ajoute : « Nous formons du personnel sur une grande variété de sujets avec une perspective autochtone. Les enfants n’ont plus besoin de venir vivre à St.Amant car ils ont les services nécessaires dans leurs propres communautés. Pour nous, la réconciliation signifie changer la façon dont on procède. Nous ne voulons pas interner un enfant avant d’avoir épuisé toutes les autres possibilités. Quand nous avons créé ces services, nous avons aussi mis en place un comité consultatif avec lequel nous nous entretenons régulièrement. »

Le programme touche aussi aux problèmes d’accessibilité, qui défavorisent les enfants handicapés au quotidien et affectent de façon négative leur qualité de vie et leur aptitude à développer leur plein potentiel. « Dans certaines communautés, des enfants ne pouvaient pas sortir en raison de leur handicap. Le Principe de Jordan leur a permis de recevoir les soins nécessaires pour qu’ils puissent être plus intégrés à la vie de leur communauté. »

La transition du programme est planifiée avec attention, bien qu’aucune date limite ne soit fixée. Ultimement, St.Amant prévoit transférer la gestion des services établis aux communautés autochtones, qui détermineront ensuite d’elles-mêmes comment servir au mieux leurs enfants et leurs familles. « Les communautés décideront elles-mêmes du moment où elles se sentiront prêtes à gérer ces services de façon autonome », précise John Leggat.

L’histoire de Jordan Anderson continuera à servir de point d’ancrage à tout ce que le programme leur sert à accomplir dans la poursuite d’une plus grande égalité pour les Premières Nations. Aujourd’hui, le Gouvernement provincial et le Gouvernement fédéral n’ont plus à se quereller à propos du financement des frais de santé pour un enfant des Premières Nations. Le gouvernement de premier contact doit couvrir les coûts.