Briser les chaînes de la solitude

23 décembre, 2025 | Initiatives et projets

Bien que les membres du Réseau Compassion Network couvrent un large éventail d’options de soins, allant du soutien en santé mentale aux soins de longue durée, en passant par les services d’urgence et les soins palliatifs, il existe un obstacle auquel se heurte presque toute la population que nous servons : la solitude.

Au début du mois, lors d’un événement organisé par l’Organisation mondiale de la santé à Genève, près de 400 jeunes leaders de plus de 40 pays ont déclaré que la solitude et l’isolement social constituaient une urgence de santé publique mondiale. C’est un signe supplémentaire qui souligne ce qui préoccupe les prestataires de soins de première ligne depuis de nombreuses années : l’isolement social croissant.

Les recherches démontrent que la solitude n’est pas seulement un état d’esprit ; les personnes qui souffrent d’isolement sont confrontées à une détérioration de leur état de santé, à des changements cognitifs, à des modifications hormonales et du système nerveux, ainsi qu’à de nombreuses autres conséquences très réelles. Pour beaucoup de personnes qui bénéficient des services de notre réseau et qui souffrent d’un trouble de santé mentale, d’un handicap développemental ou de toute autre situation de vie nécessitant un soutien supplémentaire, cet isolement peut facilement s’aggraver.

Bre Brown

« Les personnes en situation de handicap souffrent davantage de solitude, et ce sont les stéréotypes et les barrières comportementales qui existent dans la société qui en sont la cause, et non le handicap », explique Bre Brown, responsable de l’amélioration de la qualité pour le programme résidentiel communautaire de St.Amant. « On a l’impression que personne n’a assez de temps pour écouter attentivement et apprendre à vraiment connaître quelqu’un. Et si vous êtes quelqu’un qui a besoin d’un peu plus de temps parce que vous communiquez à l’aide d’un appareil, par exemple, alors le défi est encore plus grand. »

Selon Brown, l’isolement ressenti par les personnes en situation de handicap peut être dévastateur. « Une fois, quelqu’un m’a dit qu’il n’avait aucune attente dans la vie », déclare iel. « C’est à cela que ressemble la solitude. Être entouré de 8 milliards de personnes sur la planète et se sentir toujours seul, sans grand espoir de connexion ou d’inclusion sociale. »

Arlene Libich, intervenante en santé mentale communautaire chez Sara Riel, a écouté des milliers d’histoires au cours de ses 10 années de travail pour les services de soins de répit Seneca et la Ligne de réconfort, deux programmes gérés par l’organisation à but non lucratif. « Nous aidons jusqu’à cinq personnes à la fois ici et nos services sont particulièrement adaptés aux personnes qui ont besoin d’une pause, qui souffrent d’isolement ou qui se trouvent dans ce que l’on pourrait appeler des situations « pré-crise », avant que celles-ci ne dégénèrent en crise, explique Mme Libich. « La solitude peut être un sentiment très profond et triste. Vous savez que vous n’êtes pas en contact avec les autres, et vous pensez peut-être que vous devriez l’être, alors vous avez aussi l’impression de faire quelque chose de mal. Vous voulez vous confier à quelqu’un, mais vous ne savez pas par où commencer. Cela peut être débilitant. »

Arlene Libich

La Ligne de réconfort, un service gratuit accessible à toute personne ayant besoin d’une oreille attentive, a reçu plus de 30 000 appels au cours de la première année de la pandémie, et son utilité n’a pas disparu, bien au contraire. « Certaines personnes nous appellent une fois par jour », poursuit Mme Libich. « Nous faisons désormais partie de leur routine et de leur vie sociale. Nous sommes là pour écouter, et c’est ce dont beaucoup de gens ont besoin. »

Brown et Libich travaillent tous deux d’arrache-pied pour aider à créer des soutiens qui améliorent la capacité de chacun à établir des liens. À St.Amant, du financement du Réseau Compassion Network a permis de lancer un programme destiné à enseigner aux travailleurs.euses sociaux comment améliorer les liens sociaux et les centres d’intérêt des personnes avec lesquelles ils travaillent. À Sara Riel, le personnel de la Ligne de réconfort ne donne pas de conseils, mais il est tout à fait disposé à aider les appelants à trouver des solutions pour tenter de résoudre leurs problèmes.

« Lorsque je travaille au téléphone et que quelqu’un se demande comment il pourrait commencer à être un peu plus sociable, nous discutons de différentes idées », explique Mme Libich. « Je dis toujours qu’il n’est pas nécessaire de voir les choses en grand. On peut aller au café et discuter un peu avec le barista lorsqu’on passe notre commande. Parfois, le simple fait de sortir et d’être entouré d’autres personnes peut aider. Établir des liens sociaux est quelque chose que l’on peut pratiquer et améliorer. »

Tout comme les pairs aidants répondent au téléphone, St.Amant croit également au pouvoir des personnes ayant vécu des expériences similaires pour aider les autres. « Nous avons ici un groupe d’auto-représentation vraiment incroyable », explique Bre Brown. « Il dirige une grande partie de notre travail et sensibilise les autres en partageant leur histoire. Ce que ces gens ont toujours dit, c’est que ce n’est pas parce qu’une personne a besoin d’aide dans sa vie quotidienne qu’elle n’est pas capable de créer des liens avec les autres, mais simplement que cela peut se manifester différemment. Je pense qu’il est extrêmement important pour nous tous de nous rappeler que chaque personne, qu’elle soit en situation de handicap ou non, a besoin de choses différentes pour réussir dans la vie. »

Les organisations du réseau qui travaillent chacune à leur manière avec nos communautés sont toutes conscientes que les aides qu’elles proposent pour atténuer la solitude sont plus efficaces lorsque les personnes peuvent également acquérir des compétences pour s’aider elles-mêmes. « Nous constatons les progrès réalisés ici à Seneca et sur la ligne de réconfort lorsqu’elles gagnent en confiance et en autonomie pour nouer elles-mêmes des liens au sein de la communauté », explique Libich. Nous avons vu tant de personnes grandir et évoluer au fil des ans, et c’est tellement agréable de pouvoir y contribuer un peu. »

Bre Brown sait que le lien social est plus important que la présence physique, et que pour soulager la solitude de tous les membres de notre communauté, il faudra changer nos valeurs communes. « Nous affirmons tous que chaque personne a une valeur intrinsèque, mais nous devons leur montrer que c’est vrai », explique-t-iel. « Nous devons les écouter, les voir et être vraiment avec eux. Être apprécié par quelqu’un d’autre est vraiment le lien que nous recherchons tous. Il ne s’agit pas pour les personnes handicapées de « sortir » et de se faire des amis. Il s’agit pour nous tous de sortir, de nous réunir et d’apprendre à nous connaître. Tendez la main, nous en avons tous besoin. »

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